Depuis son enfance, Aiko Miyanaga a toujours observé dans le silence absolu de son atelier familial des caisses à pommes en bois figées dans le temps. N’ayant jamais osé y toucher, elle décide en 2020 d’y jeter un oeil et découvre à l’intérieur des « rondes de moules » (des moules en plâtre de Sèvres en deux parties) aux formes lourdes et blanches, d’une grande complexité, souffrant de nombreuses pièces manquantes, mais soigneusement rangées et étiquetées sur lesquelles elle lit : « Lapin, corps incomplet », « Tigre endormi, queue », ou « Chat, sans oreilles » etc.
Témoignant des années de travail minutieux menées par son père, son frère et ceux ayant étudié le Tozan Kiln (un type de four traditionnel utilisé pour la céramique), Aiko Miyanaga apprend que ces moules ont été réalisés par son arrière-grand-père Tozan Miyanaga, premier du nom, l’un des coordinateurs d’exposition du Pavillon du Japon pendant l’Exposition Universelle de Paris en 1900 ayant collaboré avec le sculpteur céramiste Numata Ichiga, le seul sculpteur japonais à étudier à l’époque à la Manufacture de Sèvres.
Poussée par l'envie de retrouver l'esprit, la créativité et les aspirations du Paris du début du XXème siècle, Aiko Miyanaga a commencé à couler du verre dans ces moules historiques, cherchant à redonner vie à ces formes endormies depuis un siècle, en les remplissant de l’air du présent. La série résultante, intitulée valley of sleeping sea, émergea ainsi comme un moyen de raviver la connexion entre le Paris de 1900 et le Kyoto des années 2020.
« Je sais très peu de choses sur ce qu’était Paris à la Belle-Epoque, lorsque mon arrière-grand-père y a séjourné avant de devenir potier. Je ne peux l’imaginer qu’à travers les quelques objets et matériaux qui subsistent. Mais en me promenant dans la ville, en imaginant les sentiments de mon arrière-grand-père alors qu’il vivait l’aube du nouveau siècle, je suis impatiente de voir le paysage parisien se refléter dans ce verre qui retient l’air du présent. Les formes absentes qui sommeillaient depuis longtemps à Kyoto sont maintenant, à Paris, reliées entre elles entre passé, présent et futur. » dit Aiko Miyanaga.
Installée au rez-de-chaussée et au premier étage d’un hôtel particulier érigé en 1900, Le Clézio Gallery est ainsi fière de présenter 1900-2025 : souffle de lumière, la première exposition personnelle d’Aiko Miyanaga en France. Artiste établie et issue d’une prestigieuse lignée de céramistes japonais, elle vient de bénéficier d’expositions muséales au Japon en 2023 à la Maison Hermès, au Mori Art Museum et au Tomoya Glass Museum, et en 2024 au Takamatsu Art Museum, au Saga Prefectural Art Museum, au Musée d'art moderne de Saitama et au Musée d’Art de la Préfecture d’Aichi.